La femme qui fuit
Anaïs Barbeau-Lavalette, la narratrice et à la fois l’auteur de ce roman, n’a pas vraiment connu sa grand-mère maternelle :
Suzanne Meloche. Dans La femme qui fuit, elle
a décidé de nous livrer le récit de cette femme ayant abandonné ses enfants en
bas âge.
Sa petite enfance se déroula pendant la
seconde guerre mondiale. Suzanne vivait dans une grande famille. Les temps étaient durs. Sa mère enfantait malgré elle afin d’obtenir
les pensions offertes par le gouvernement à cette époque. Claudia, la mère de
Suzanne repoussait son amour et son affection. Du mieux qu’elle peut, Suzanne vit sa
vie d’enfant, d’adolescente et de jeune adulte. Jusqu’à ce qu’elle ait l’opportunité
de s’enfuir pour la première fois : à Montréal. Ce n'est que des décennies plus tard qu'elle remettra les pieds dans sa ville natale d'Ottawa. Suzanne est une artiste dans l’âme : vagabonde, poète, libre.
Elle rencontre un groupe d’artistes qui deviendront plus tard les signataires
principaux du Refus Global : Jean-Paul
Riopelle, Borduras et Gauvreau en font partie. Suzanne tombe amoureuse de
Marcel, peintre. C’est avec lui qu’elle fondera une famille. Viendra au monde Mousse, puis plus tard Nicolas. Incapable de rester dans cette prison qu’est le rôle d'une mère,
Suzanne s’enfuit laissant la petite Mousse derrière elle.
À partir de ce moment, elle ne cessera de fuir
jusqu’à sa mort. Toujours dans le but de se faire accepter, de se
faire reconnaître, elle se joindra à des groupes. Notamment à un groupe d’activistes
souhaitant l’abolition de la ségrégation raciale aux États-Unis. On suit le parcours d’une femme libre, qui n’a
pas d’attaches, mais beaucoup de convictions.
Le roman se lit en un coup de vent. Je ne
pensais pas qu’il était possible de lire un livre de 378 pages en moins de deux
heures, mais ici, ça été le cas. La narration se fait au ‘’tu’’. Anaïs
Barbeau-Lavalette pointe sa grand-mère du doigt par cette manière d’écrire en
lui reprochant de les avoir abandonnées, elle et sa mère. Plus l’histoire
avance, plus le ‘tu’’ est compréhensif. Son histoire n’est pas banale. Même si
Suzanne Meloche n’aura jamais été une mère présente, elle reste une femme et une humaine.
L’auteure a magnifiquement su relater et
inventer le passé de sa grand-mère. Un passé qui lui échappait jusqu’au moment
de sa mort. Comme quoi la vie n’est pas toujours celle que nous avons en tête,
comme quoi parfois elle nous joue des tours et n’en fait qu’à sa tête.
À mon avis, ce roman touchant, profond et
dont la lecture est plus qu’agréable est le plus beau cadeau que pouvait faire
une petite-fille à sa grand-mère. Un livre essentiel, plus qu’une suggestion.
☆☆☆☆
La femme qui fuit
Anaïs Barbeau-Lavalette
Marchand de feuille (2015)
378 pages
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