Sans sang: la vengeance remise en question
Novecento Pianiste, un très court roman psychologique et philosophique qui raconte, dans un style assez différent, le récit d’un homme qui est né sur un bateau et qui ne l’a jamais quitté, m’a fait connaître un de mes auteurs favoris : Alessandro Baricco. Récemment, j’ai mis la main sur un second de ses brefs romans : Sans sang.
Dans cette histoire, l’auteur
italien nous transporte à une autre époque. La première partie se déroule dans
la campagne, sur une veille ferme érigée sur une plaine. Manuel Roca y vit avec
ses deux enfants, sa fille ainsi que son petit garçon. Un jour, alors qu’il
voit une vieille Mercedes rouler dans la direction de sa demeure, Roca ordonne
à son fils de se cacher et enferme sa petite fille sous une trappe. Des hommes
arrivent. Ils sont armés. Ils viennent se venger des pratiques du médecin qu’était
Rocca pendant la guerre. Dans la confusion et la violence, la fin de la
première partie se termine. Sans toutefois que la petite fille ne soit touchée.
La seconde partie du roman se
déroule des décennies plus tard. La fillette de quatre ans en a maintenant
soixante-dix et elle rencontre l’un des agresseurs de la ferme. Une longue
démarche vers la compréhension et le pardon commencera. Aura-t-elle su le
pardonner même après toutes ces années ? Ou sera-t-elle confronter aux mêmes
désirs de vengeance qu’avaient eu ces bandits à l’époque ?
Sans textuellement être mentionné,
le récit nous donne l’impression de se situer après la Seconde Guerre mondiale.
Les pratiques médicinales qu’aurait effectuées Manuel Roca lors de la guerre
concorderaient avec les tests et la torture qui étaient fait sur les prisonniers
pendant ces années. Ce ne sont que des hypothèses, évidemment, puisqu’à ce
sujet rien n’est explicite dans le récit. Tout porte à l’interprétation, à l’analyse.
Alors qu’il est confronté aux attaquants, Manuel Rocca prétend même ne pas être
responsable de ce dont on l’accuse. Qui dit la vérité ? Qui ment ? Est-ce que
la vengeance est alors justifiée ? Est-il possible de justifier la vengeance ?
C’est tout autour de ces questions que porte ce bouquin de seulement 112 pages.
J’ai beaucoup apprécié le deuxième
passage. La longue discussion qu’ont les deux partis nous fait réaliser
beaucoup de choses et nous remet en question du tout au tout sur le concept de
la vengeance. Malgré la brièveté de l’histoire, j’ai trouvé que les personnages
y étaient bien développés. La fillette, tout particulièrement, a su conquérir
mon cœur et mon admiration dès la première séquence. Alors qu’elle se retrouve
terrée au fond de la trappe, ses réflexions et ses petites manies étaient
tellement bien décrites que l’on aurait pu croire que Baricco avait observé les
comportements d’une petite fille et s’en était inspiré.
Le romancier italien, une fois de
plus, conquiert mon cœur avec ses mots justes, son style bien particulier et sa
structure intéressante. Le genre philosophique étant de loin mon préféré, je
compte bien me procurer un autre de ses romans éventuellement ! En espérant en
être autant impressionnée !
Je vous le recommande totalement !
☆☆☆☆
Sans Sang
Alessandro Baricco
Albin Michel (2003)
112 pages
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